ARCHIVES (2000)

Quand un enfant vole

Un enfant qui vole une ou deux fois dans sa vie, j’ai l’impression que cela doit être très courant. J’ai aussi passé par là. On sait que les enfants essaient de transgresser des interdits et le vol en fait partie. Alors, quand on apprend que son enfant a volé, il ne faut peut-être pas trop s’étonner mais plutôt essayer de bien réagir afin que cela ne se reproduise si possible plus.
Une de mes voisines reçoit un coup de téléphone: une femme accuse la fille de ma voisine d’avoir volé un collier à sa fille. La mère nie tout en bloc. Elle ne peut imaginer que cela soit vrai. Elle est très fâchée contre la personne qui a téléphoné. Plus tard, elle découvre le collier dans le cartable de sa fille. Sa colère ne diminue pas. Elle a trop honte. Son choix est alors de continuer à nier, à (se) cacher la réalité.
Ce n’est pas simple de savoir ce qu’il faut faire. Mais j’ai l’impression que si la honte ne nous submergeait pas dans une situation telle que celle-ci, nous saurions mieux réagir. Notre enfant doit rendre ce qu’il a volé et avouer ses torts à la personne lésée. Il doit savoir qu’il fait du mal à l’autre et que c’est interdit. Le parent ne peut, à mon avis, rester silencieux et se rendre ainsi complice.
L’envie de prendre ce que l’autre possède est certainement la première motivation du « voleur », mais je pense que le vol peut aussi être incité par une envie de se faire remarquer par ses parents comme d’autres seraient violents avec des copains pour que les adultes s’intéressent à eux, au moins pour les gronder. Je crois que c’est ce qui me motivait quand, petite, j’ai volé quelques fois. Je volais sans réel plaisir à cause de la honte et j’espérais presque que quelqu’un me surprenne pour qu’on fasse, à cette période-là, un peu plus attention à moi. D’ailleurs, transgresser un interdit sans que personne ne s’en aperçoive semble à priori un peu inutile.

Le bracelet
Ma fille, vers 4 ans, a rapporté un petit bracelet en or de son école, prétendant qu’elle l’avait trouvé à la récréation. Nous lui avons demandé de le donner à sa maîtresse, car c’était un objet de valeur qui devait être déposé aux objets trouvés. Ma fille a alors montré quelques résistances. Ce geste pourtant simple de rapporter un objet à sa maîtresse qu’elle aimait bien la contrariait sans qu’elle puisse nous en expliquer la raison. Nous sommes restés attentifs, car nous ne voulions pas laisser cette histoire dans l’oubli, surtout qu’elle n’avait pas l’air bien. Quelques jours plus tard, elle a avoué avoir pris ce bracelet sur le bureau de la maîtresse. Sans trop la culpabiliser, nous en avons parlé et l’avons obligée à le rendre. Nous avons discuté longuement ensemble, non seulement du vol en général, mais aussi du fait qu’elle se sentait mieux depuis qu’elle nous avait parlé.

A la piscine

Il y a aussi d’autres situations où les parents ont le choix de s’impliquer ou non. Je me trouvais l’été passé à la piscine avec mes deux enfants. J’étais couchée sur mon linge de bains. Ma fille Fabienne, assise, observait une fille aux cheveux bruns, âgée d’environ 11 ans, installée avec ses trois jeunes frères sur des linges. Arrive une fille blonde du même âge qui invite la fille brune à venir dans l’eau. Cette dernière se lève, cache son porte-monnaie sous son linge et court dans l’eau avec sa copine et ses frères. Peu après, la fille blonde sort de l’eau, s’approche du linge, regarde autour d’elle, aperçoit Fabienne mais ne s’en inquiète pas, s’empare du porte-monnaie, prend de l’argent, remet le porte-monnaie à sa place et part en direction du kiosque. Tout de suite ma fille, toute impressionnée, me raconte ce qu’elle a vu. J’insiste alors auprès d’elle pour qu’elle dise à la victime du vol ce qu’elle a vu. Elle n’ose pas. Je le fais, car je ne voudrais pas que cette fille se fasse injustement accuser par ses parents d’avoir trop dépensé. Elle remarque qu’il lui manque une dizaine de francs. Suite à la description qu’a faite Fabienne de la voleuse, la fille brune va questionner sa copine blonde qui nie et part en courant.
Il aurait été plus facile pour moi de rester étendue au soleil, mais face à mes enfants, je ne pouvais rester sans réaction.
Dans cette histoire, Fabienne a d’ailleurs été particulièrement choquée par le brusque changement de comportement de la fille blonde. Quand elle l’avait vue pour la première fois inviter sa copine, elle l’avait trouvée sympa. Quelques minutes plus tard, elle se rendait compte que c’était une enfant qui pouvait mentir et voler. Elle a tout de suite pensé à ses amies. L’une d’entre elles pourrait-elle aussi la trahir?
Mais ça, c’est encore une autre histoire...

Julie

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