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(2000)
Vos
filles ne tricotent plus, elles fument!
Quelle
phrase merveilleuse, quelque peu désuète, mais si
pleine de bon sens! Cest une de nos plus fidèles et
anciennes abonnées (88 ans), qui nous la envoyée
et elle ma inspiré ce qui suit.
Je me souviens être « tombée de haut »
le soir où, de ma voiture, japerçus ma fille
qui fumait à larrêt de bus entourée de
sa bande de copains et copines. Je ne mattendais bien sûr
pas à la voir tricoter, mais de là à la voir
tirer sur une cigarette, et sur le trottoir en plus... quelle honte,
quelle déception! ! !
Notre
message navait-il donc pas passé, nos efforts de dissuasion,
nos discussions sur la santé, tout cela sétait-il
envolé? Elle qui mavait affirmé du haut de ses
15 ans quelle ne fumerait jamais, car cela nuirait à
son asthme et à ses allergies, et puis que de toute façon
elle nen avait pas les moyens.
Deux ans ont passé et jai vécu dans lillusion
quelle ne fumait pas. Lors de ses rentrées tardives
quand elle venait nous dire un petit « bonsoir, je suis là
» en ouvrant à peine la porte de notre chambre à
coucher, je ne sentais rien. Lorsque le lendemain je reniflais lodeur
âcre sur ses vêtements, je me disais bien naïvement
que cétait la fumée des autres qui laissait
ces traces désagréables. Mais ce soir-là, jai
dû descendre sur terre et me rendre à lévidence
quelle navait pas su résister.
Elle reçoit maintenant plus dargent de poche, elle
sort plus souvent et fréquente des pubs où lon
discute des heures à refaire le monde avec ses potes... cigarette
au bec. Dans un brouillard de fumée si enveloppant, on essaie
de se forger un personnage, on peut aussi y cacher sa timidité,
sa maladresse, mais surtout on a besoin de se fondre dans la grande
famille des pairs qui pour paraître plus crédibles,
plus « mûrs » fument cigarette sur cigarette.
De retour à la maison après la « découverte
», je dus retenir ma colère, non pas tant envers elle,
mais surtout envers moi qui me sentais trahie et navais pas
été à la hauteur. Curieux sentiment que celui
de la culpabilité, alors que cétait elle qui
avait décidé de son comportement et non moi.
Le lendemain je sentis la nécessité de rediscuter
avec elle sur ce sujet et de lui exprimer ma désapprobation,
même si je ne pouvais lui interdire de fumer. Lui expliquer
que ce rituel de la cigarette ne constituait quun moyen artificiel
de saffirmer, et que cétait au contraire le refus
de fumer qui aurait vraiment été un acte de volonté.
Que sa santé en pâtissait et certainement aussi son
porte-monnaie. Je lui suggérais de réfléchir
et dessayer de fumer le moins possible pendant les soirées
et surtout de ne pas en faire un geste machinal, un réflexe
dès quon a les mains vides. Je lui faisais remarquer
quà la maison il ny avait pas trace de cigarette
et quelle pouvait donc tout à fait vivre sans fumer!
Jaurais à ce moment certes préféré
quelle tricote à la place de fumer, mais le temps des
petites filles modèles est bien révolu. Heureusement
dailleurs pour les jeunes daujourdhui! Pour les
parents, cest le temps des négociations perpétuelles,
des contrats à renouveler sans cesse, bref de lexercice
de la patience et du dialogue qui prévaut. Il y a deux
jours, elle est rentrée en sexclamant: « Tu te
rends compte, maman, jai vu des gamins de 12 ans à
larrêt du bus qui fumaient, quelle horreur! ».
Aurait-elle fait un tout petit bout de chemin?
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