ARCHIVES (2000)

Les lecteurs ont la parole
Pokémon


Il est samedi et mon fils de 9 ans et demi va faire le premier achat important de sa vie avec ses propres économies. Il s’agit d’un jeu électronique qui fait fureur parmi les enfants de son âge. Le jouet coûte cher et l’achat a fait l’objet d’hésitations de sa part et de discussions préalables avec moi. Mon fils m’explique que le jeu n’est pas violent, que les héros électroniques sont parfois gentils, parfois méchants (comme dans la « vraie vie »), qu’il est impossible de les anéantir, qu’on ne peut que les affaiblir.
Je donne donc mon feu vert pour cet achat et son papa l’accompagne au magasin. Le bonheur de mon fils fait plaisir à voir et pendant les jours qui suivent il nous abreuve abondamment d’explications absconses sur les petits personnages du jeu. Entre autres, il nous demande si c’est une bonne idée d’amener le jeu à l’école. Son papa le lui déconseille, car on risque de le lui casser ou, pire, le lui voler. Mon fils dit sagement qu’il va tenir compte de cet avertissement...
Il est vendredi soir et mon fils rentre en pleurs à la maison. On lui a volé son Pokémon. Drame et désespoir! Ma première réaction est de le serrer dans mes bras et de le consoler comme un tout petit. Les larmes essuyées, on en discute. Qui, quand, comment? Au cours de la discussion, je mesure la candeur et la naïveté de mon aîné, malgré sa taille qui rivalise avec la mienne. Et je me dis que, certes, c’est une expérience douloureuse, mais qui peut être édifiante. « Eh, oui, mon fils! Tu étais prévenu, mais tu t’es jeté dans la gueule du loup et le loup t’a croqué! »
Dans un mois, mon aîné va fêter son dixième anniversaire. Des amies à qui j’ai raconté l’histoire du vol me disent que ce sera une excellente occasion pour lui offrir un Pokémon. Je réponds que j’y ai réfléchi, mais que j’ai décidé d’adopter une ligne dure, car je crois bénéfique pour mon enfant de mener cette expérience jusqu’au bout, que je ne pourrais pas toujours être la fée qui efface les problèmes d’un coup de baguette magique.
Hier, le grand-père de mon fils (au courant de son « malheur ») me dit qu’il a l’intention de lui offrir un Pokémon pour son anniversaire. Je lui explique ma position et sa justification éducative, tout en le laissant faire comme il a prévu.
Et la petite fille cachée en moi est heureuse de voir que les baguettes magiques existent!

Diana

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