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(2001)
Chérubin
ou diablotin?
Samedi au supermarché bondé: notre tour à la
caisse arrive enfin. Mon fiston de 3 ans se tient presque tranquillement
dans le chariot rempli à ras bords, assis en équilibre
instable sur les bouteilles deau et les tomates. La caissière
est visiblement « speedée », moi aussi.
Nous commençons à nous passer fébrilement les
provisions que jentasse dans les sacs, quand tout à
coup mon fils attire lattention de la caissière, la
gratifiant dun: « Bonjour, madame Fleur! »,
accompagné dun charmant sourire. La dame sarrête
un instant, sourit à son tour, répond au petit et
me félicite: « Mais quest-ce quil
est adorable votre bambin, Madame! ». Je suis fière
de ma progéniture...
Après cet instant de grâce au milieu de la cohue, chacune
reprend son activité avec un enthousiasme renouvelé.
Le chariot est bien plein maintenant et nous prenons aimablement
congé de la caissière. Mon fiston trône toujours
sur les sacs et pendant que nous nous dirigeons vers la voiture,
interpelle soudain un monsieur dun certain âge: « Bonjour,
monsieur Pourri! ». Outré, le monsieur en question
séloigne en bougonnant: « Les gosses daujourdhui,
cest vraiment nimporte quoi! ». Confuse,
je gronde le petit...
Cinq minutes seulement séparent ces deux épisodes.
Mon fils est-il le garçon charmant qui a séduit la
caissière ou le terrible impertinent qui a insulté
le vieux monsieur? Qui a perçu une image juste de lui? Et
pourquoi mon enfant a-t-il agi ainsi, sans aucune raison apparente
dans un cas comme dans lautre? Décidément, ce
petit incident suscite beaucoup de questions intéressantes.
Si on va au-delà dun simple « arrêt
sur image » et que lon prend le temps dobserver
les enfants, on se rend vite compte quils apprennent beaucoup
en expérimentant. Et ceci concerne également la communication,
parmi dautres apprentissages. En constatant leffet produit
par leurs paroles sur lentourage, ils apprennent à
apprivoiser les usages et à mieux maîtriser le langage,
à en jouer et aussi à lutiliser à bon
escient. Cela leur permet, devenus plus mûrs, de dire des
« je taime » pleins de sens, de manier
la plaisanterie avec discernement, mais aussi denvoyer promener,
délibérément, ceux dont la tête ne leur
revient pas. Ce qui, me semble-t-il, est parfaitement leur droit...
et nen fait ni des anges, ni des diables, mais les deux à
la fois.
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