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Mon
beau sapin
Il
est de tradition dans notre famille, denvelopper de magie
non seulement larrivée des cadeaux de Noël sous
le sapin, mais aussi lapparition du sapin lui-même dans
un coin du salon. La légende familiale veut que ce soient
les petits lutins qui aident le Père Noël, et qui, peu
avant la fête, nous apportent en cachette un magnifique arbre
déjà tout orné.
Pendant des années, javoue que cette histoire marrangeait
parfaitement, car la veille de la fête, à lépoque
où le petit était encore vraiment petit et dormait
à poings fermés, je passais les dernières heures
de la soirée à décorer le sapin, à mon
goût et à mon idée, en toute tranquillité.
Larbre de Noël, cétait mon truc à
moi et il ne fallait pas sen mêler. La magie régnait...
Jen avais à tel point lexclusivité que
la participation de mon mari se limitait à fixer solidement
larbre, de façon à éviter sa chute et
à disposer intelligemment les bougies, de façon à
éviter les incendies. Car, notre sens de lesthétique
ne souffrait rien dautre quun vrai sapin avec de vraies
bougies qui crépitent et embaument.
Mais à lépoque dont je vous parle, le petit
avait déjà grandi et après force hésitations,
avait définitivement cessé de croire au Père
Noël. Il avait fallu sexpliquer aussi sur le mystère
du sapin. Une fois lénigme dévoilée,
le petit voulut, bien sûr, sassocier à la décoration.
Jacceptai, disons, avec joie, car cest ainsi que les
gentilles mamans devraient accepter de se faire aider et que les
choses devraient se passer. Et cest là, au contraire,
que les choses se gâtèrent...
Le petit avait son style, javais le mien et ils se sont révélés
pas franchement compatibles. Mon humeur fut progressivement gâchée
à mesure que les petites mains accrochaient les ornements
dune façon que, malgré ma supposée indulgence
maternelle, je trouvais toujours pas assez ceci ou trop cela...
Je me retenais de réagir (du moins le croyais-je) et jallais
discrètement « rectifier » le travail
du petit qui poursuivait son oeuvre maladroite avec un enthousiasme
imperturbable.
Au bout dun long moment, ma maman qui suivait lévolution
des décorations sans interférer (ce dont je lui étais
reconnaissante, cétait déjà assez dur
comme ça), intervint: « Menfin, laisse-le
faire comme il peut et comme il en a envie. On se demande qui est
le plus gamin de vous deux... ».
Là, jai eu tout de même un peu honte. Quelle
importance pouvait avoir une boule accrochée de travers?
Après tout, cétait mon fils que le sapin était
censé émerveiller! Mais... et mon plaisir dans tout
ça? Ah, quil est parfois dur de grandir...
A partir de cet instant, je parvins, tant bien que mal, à
me raisonner et à lâcher du lest. La décoration
du sapin fut terminée dans une ambiance nettement plus détendue,
et, cette année-là, croyez-moi, jai fini par
trouver notre arbre de Noël peut-être moins esthétique
que dhabitude, mais tellement plus beau!
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