ARTICLES RECENTS

Cauchemars

Déjà toute petite elle pleurait souvent la nuit. Il nous fallait la consoler et la câliner jusqu’à ce qu’elle se réveille pour sortir de son rêve. Nous la recouchions et, en général, elle se rendormait sans peine. Jamais elle n’a réussi à nous dire ce qui agitait ses nuits et l’épouvantait.

Devenue grande, afin de ne pas nous réveiller, elle se glissait dans le lit de son frère ou de sa soeur. Combien de fois ai-je trouvé son lit vide au réveil le matin et celui d’à côté avec deux petites têtes dépassant de la couette!
Peu à peu ses cauchemars se sont calmés et ont été relégués au passé, du moins c’est ce que nous avons tous cru, jusqu’à ce fameux anniversaire: elle était invitée chez une amie, pour fêter ses 11 ans, lors d’une pyjama partie: pizza, soirée avec film, puis nuit de papotages...
Vers 10 heures, le téléphone a sonné: « Tu peux venir me chercher, maintenant? ». Le ton ne laissait aucune place à la discussion: En partant de chez son amie, je n’ai même pas eu le temps de poser une question: dès que la porte se fut refermée, elle me dit: « Le film qu’ils avaient choisi était L’exorciste, c’était horrible! Heureusement que tu es venue! ».
Suite à cette soirée elle a de nouveau fait de nombreux cauchemars et a fini plus d’une nuit dans le lit de sa soeur. Elle s’est aussi jurée qu’elle ne se ferait plus surprendre et, quitte à passer pour une lâcheuse, qu’elle ne regarderait plus jamais ce genre de film.

Mais un jour, une soirée cinéma fut planifiée avec des amis: certains d’entre eux avaient parlé du Cercle, nouveau film d’horreur. Une de ses amies lui promit de refuser net avec elle d’aller voir cette projection, mais devant le groupe, en particulier les garçons, l’amie ne dit plus rien, et voilà notre fille devant un dilemme: aller voir ce film ou rentrer seule dans la nuit. Ce sont les copains qui eurent le dessus. A la sortie de la salle, l’amie lui avoua qu’elle aurait mieux fait de la soutenir, mais le mal était fait avec les nuits d’angoisse qui suivirent.
Visiblement tout le monde n’est pas égal devant les suggestions de peur. Certains les vivent plus intensément que d’autres. Elle ne se fait pas du cinéma, mais est plus sensible que la moyenne, ce qui lui a valu tant de cauchemars étant petite et qui maintenant l’empêche de comprendre le plaisir qu’ont beaucoup de ses amis à se faire peur en regardant un film d’horreur.

Laurence

Retour au menu "sommaire 2003"

 

 

 

  Informations :
info@entretiens.ch
  Réalisation du site:
NetOpera/PhotOpera
 

© Entretiens sur
l'Education, 2000

Accueil Articles Archives Abonnements Adresses Le journal Articles récents