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(1992)
Savoir
dire non
As-tu
bientôt fini de faire claquer cette porte ? Oui a mangé
les quatre yogourts qui restaient dans le frigo ? Je me demande
qui a joué au tailleur de pierre avec un marteau sur le rebord
des escaliers. Mes rouges à lèvres sont de nouveau
à moitié rongés; Jessica, avoue: c'est toi,
n'est-ce pas ?
Madame Ducommun n'en peut plus. Du matin au soir, que de déceptions!
"Ces enfants se croient tout permis. Ils ne respectent rien
ni personne." Elle a beau avertir, menacer, crier, punir: pas
de résultat. Comment en est-elle arrivée là ?
Elle voulait être une mère compréhensive, large
d'idées, moderne. Elle s'était juré qu'elle
n'élèverait pas ses enfants comme elle l'avait été
dans la crainte et la coercition. Elle refusait donc de se servir
de la force et de la peur. En toute occasion, elle s'efforçait
de rechercher l'harmonie.
Ce n'est pas l'harmonie qu'elle a obtenue, mais la gabegie. Parce
que ses enfants ne sont pas venus au monde avec une paire d'ailes.
Ce sont des êtres humains, pas des anges. Ils ont beau aimer
leurs parents, ils ne sont pas animés à leur égard
uniquement de sentiments admirables. L'égoïsme, la colère,
l'envie, la rage de détruire les guettent comme tout le monde.
A moins d'un miracle, ils ne découvriront pas tout seuls
les limites qui permettent la vie en société.
Madame Ducommun craint de se montrer ferme. Elle croit qu'ils interpréteraient
cette attitude comme un manque d'amour. Erreur! Les enfants ont
plus souvent qu'on ne croit des antennes qui les renseignent sur
les intentions véritables d'autrui.
Et plus souvent qu'on ne croit, ils ont besoin de limites précises
qui les aident à se structurer et à se consolider.
Et qui sont indispensables à la vie en groupe.
Marguerite
Loutan
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