ARCHIVES (1994)

S’adapter en FAMILLE

"Comment éviter à nos enfants un total déracinement culturel et comment les préparer au retour en Suisse?"
Voici la question qui se posait à ce couple de fonctionnaires internationaux qui, après différents postes aux Philippines, en Birmanie, au Laos et au Honduras, se retrouve à Genève pendant deux ans, puis repart au Costa Rica. Leurs deux enfants, Arnaud 10 ans et Ariane 7 ans, ont fréquenté successivement jardins d’enfants et écoles en langue anglaise, espagnole et française. Ils repartent en Amérique latine pour 3 ans, après lesquels il faudra se réinsérer dans le système scolaire genevois, enrichis certes, mais aussi déracinés par ces multiples expériences linguistiques et culturelles.

Comment s’y préparer?

Leur mère raconte: “La décision de les faire fréquenter une école américaine, puisque le lycée français de San José ne convenait pas, comportait l’obligation de nous organiser pour assurer à ces chers petits une éducation en français.
La France possède un service d’enseignement à l’étranger tout à fait remarquable, le CNED. N’importe quel enfant peut être inscrit, passe un examen écrit qui déterminera son niveau et reçoit les cours avec un programme très strict d’épreuves à envoyer au Centre toutes les trois semaines.
Seulement voilà, il faut bien trouver quelqu’un qui enseigne la matière aux enfants, qui les encourage à travailler, et c’est un travail astreignant à leur âge, car Arnaud et Ariane devaient consacrer tous les jours deux heures de leur temps libre après l’école pour finir les programmes.
Ce fut donc leur volonté autant que la mienne qui fut engagée pendant ces trois ans au Costa Rica. Ces trois années nous ont beaucoup appris sur nous-mêmes. Cela a été très dur pour les enfants, mais pour moi encore plus, car il n’est pas facile de passer de l’état d’esprit de maman qui prépare le goûter, s’amuse une petite demi-heure à la piscine, écoute les plaintes ou les joies quotidiennes, à celui de maîtresse qui déclare que la récréation est terminée.
Non seulement les frustrations sont énormes au niveau de l’organisation du travail car un enfant n’est pas trop sensible en début de semaine aux délais imposés par le Centre, mais encore faut-il savoir enseigner correctement afin d’amener l’enfant à travailler seul, et ne pas lui mâcher son travail, ce qui n’aurait aucune valeur.

Comment s’organiser?
Si vous décidez de faire travailler vos enfants séparément chacun dans sa chambre, vous vous exposez à une navette incessante, à des interruptions énervantes pour les uns et les autres débouchant généralement sur une démobilisation, ou du plus malin qui s’échappe et qui va jouer, ou du plus pénible qui s’ingénie à mettre les bâtons dans les roues jusqu’à ce qu’on lâche!
Si au contraire vous installez vos enfants face à face à la même table, vous vous retrouverez tôt ou tard dans une cacophonie peu propice à la concentration.
Finalement nous étions arrivés à une entente cordiale, à une organisation de travail souple avec horaire approprié à chacun, ce qui signifiait pour moi un temps de travail plus long, mais moins épuisant. J’avais une amie qui venait m’aider lorsque les programmes s’avéraient trop lourds, mais je n’ai jamais choisi la solution d’un précepteur, car je ne voulais pas introduire un temps d’étude extra-scolaire trop rigide et imposer aux enfants encore un enseignement strict alors qu’on leur avait expliqué que cet apprentissage du français était une affaire de famille pour se préparer tous ensemble à mieux sauter lors du nouveau poste.

Prêts pour le retour?
Nous y sommes arrivés, et plutôt bien, puisque ni Arnaud, ni Ariane n’ont connu de déboires lors de leur réinsertion dans une classe suisse et qu’ils sont maintenant totalement trilingues.”

Claire-Lise Blatter

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