ARCHIVES (1994)

Allaiter, un choix, une joie

Lorsque je croise ces femmes aux ventres rebondis, je fonds. Aujourd’hui, bien en évidence sous des tee-shirts tendus aux couleurs fortes, on dirait qu’ils ont envie de montrer au monde qu’ils sont bien là et qu’ils font déjà partie de nous. Pourtant, je lis que la croissance démographique européenne et suisse en particulier chute sensiblement, voire dangereusement. Je ne peux alors m’empêcher de garder le sourire, car en été, j’ai l’impression de voir partout des femmes enceintes et heureuses de l’être. Elles sont bronzées, alertes, et elles restent minces comme des mannequins. J’aime les regarder, j’aimerais toucher leur ventre prometteur, leur ventre qui s’ouvre à la vie, au monde.
Je fonds encore plus lorsque je rencontre une femme qui, penchée sur une petite tête toute rose, donne le sein à son bébé à l’ombre d’un sapin ou d’un parasol. Je sens en moi monter ce bonheur, cette paix, cette jouissance qui accompagnaient les tétées de mes enfants.
J’ai presque envie de retrouver ces instants, et il m’est arrivé de ressentir ce picotement caractéristique de la montée du lait encore longtemps après que j’eus fini d’allaiter. La réunion, la symbiose, la tranquillité qui marquent ce moment privilégié est une des plus belles choses que j’ai ressenties dans mon existence de mère.
Certes l’allaitement demande de la patience, du temps, surtout les premières semaines. Il faut trouver un rythme qui convienne au bébé, à la maman, à la famille, et le mode de vie occidental trépidant et exigeant ne favorise pas toujours cette recherche. Quoi de plus naturel pourtant que d’allaiter? J’ai nourri mes trois enfants à la demande, même si cela représentait au début 7 tétées en 24 heures, mais au moins ainsi je maintenais et même augmentais ma production de lait, et cela me donnait la confiance dont une mère nourricière a si besoin. Et tant pis pour la poussière qui s’accumulait, le linge pas toujours repassé et les repas bâclés. Le mari, la belle-mère ou la voisine, et même les frères et soeurs plus grands se révélaient alors des aides inestimables.
Au bout de 8 semaines en général, un rythme régulier s’installe, et pendant les mois suivants, partir en voyage, aller en visite chez des amis, au restaurant, faire ses courses, rester coincés dans des bouchons sont des jeux d’enfant. On a “à portée de sein” si j’ose dire, la nourriture adéquate, préparée, stérile et à la bonne température. Même pour les mères qui travaillent, il y a la possibilité de trouver un moment pour nourrir son enfant, croyez-moi!
Allaiter son enfant relève bien sûr d’un état d’esprit, d’un choix dans notre civilisation. On ne forcera aucune mère à le faire, mais on pourra l’encourager et la convaincre, ainsi que son mari d’ailleurs, que donner le sein à son enfant fait partie de cette expérience merveilleuse et en somme toute naturelle qu’est la maternité.

Une maman convaincue et un papa aussi!

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