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(1995)
Pouvoir
dire «adieu»
Je
navais pas huit ans quand ma mère est morte après
une année de maladie. Ce dont je me rappelle, cest
quelle se plaignait davoir mal au ventre et quelle
avait été hospitalisée plusieurs fois. Elle
mavait responsabilisée en mexpliquant comment
réagir si je la trouvais inanimée.
A un certain moment je fus envoyée en internat à lEcole
daltitude de Montana. Cest là quun jour
le directeur mannonça sa mort. Le déroulement
de cette journée reste profondément gravé dans
ma mémoire. Je nai pas assisté à son
enterrement et je regrette encore aujourdhui de navoir
pu lui dire «adieu».
Pendant des années je me suis rendue au cimetière
avec sa soeur (ma tante) pour entretenir la tombe de ma mère.
Lorsque la concession a été échue, jai
transplanté dans mon jardin «son rosier» et une
jeune pousse dif. Aujourdhui, celle-ci mesure au moins
trois mètres.
Nos enfants étaient âgés de quatre ans lorsque
leur grand-mère paternelle est décédée
subitement pendant un séjour dans son village natal. Habitant
la même maison, nous avions des contacts étroits. Comment
permettre à nos enfants de prendre congé delle?
Bien trop turbulents pour quils viennent à léglise,
nous avons décidé de les emmener à la morgue
pour quils puissent la voir une dernière fois et lui
dire «adieu». Ce fut un moment très émouvant
dont ils se rappellent encore.
Quelques temps plus tard ma fille men parle en disant: «Tu
sais, je croyais que les morts devenaient tout noir, mais quand
on a été voir mémé dans son cercueil,
jai remarqué que ce nétait pas vrai!»
Après discussion, il sest avéré que cette
fausse conviction avait été acquise à la lecture
de bandes dessinées.
Christiane Walker
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