ARCHIVES (1995)

Nos lecteurs ont la parole

Chères rédactrices,
C’est avec émotion que j’ai lu l’article «C’est décidé, je me tire...» de Denyse Sergy (octobre 1995). Je dois vous dire que lorsque j’ai reçu votre journal, ma fille de 14 ans était en fugue pour la quatrième fois en six mois.
Elle est chaque fois partie «en bande» avec des adolescents de son âge. N’ayant aucun moyen financier à disposition, pour obtenir à manger ou des vêtements de rechange ils volent dans les grands magasins; pour dormir ils cherchent des endroits peu fréquentés (vieille bâtisse abandonnée, sous-sol ou... bateaux). Ce qui signifie qu’au moment où ils sont retrouvés, ils doivent répondre de leurs actes délictueux devant la police et la justice.
Pour nous, les parents, c’est une période particulièrement pénible à vivre. Les sentiments d’inquiétude côtoient la culpabilité, voire la colère.
Une fois sa disparition annoncée à la police, il ne nous reste plus qu’à attendre... son retour, un téléphone ou son arrestation. Que d’heures passées à côté du téléphone!
Partir soi-même à la recherche de son enfant dans une grande ville apparaît vite comme inutile si l’on n'a pas de renseignements précis sur le lieu où il peut être.
On nous a dit qu’une «bonne fugue» est une fugue où l’enfant revient de lui-même, c’est peut-être vrai, mais que c’est difficile à accepter. Il me semble qu’il faut chercher tous les indices pour le retrouver le plus rapidement possible.
Toutefois, la vie continue pour la famille, il faut bien travailler, s’occuper des autres enfants, respecter ses engagements sociaux et essayer de maintenir le moral de tous.
Pendant la première fugue, qui a duré plus de deux semaines, la famille et les connaissances qui étaient au courant m’appelaient souvent pour me demander des nouvelles. Je racontais ainsi x-fois la même chose et supportais mal que la ligne téléphonique soit occupée et me prive, peut-être, d’un appel de ma fille. Lors des fugues suivantes, qui ont été nettement moins longues, je n’ai informé personne!
Je n’ai pas encore le recul nécessaire pour expliquer le pourquoi de ces fugues, mais ce que j’ai découvert, c’est que ma fille était assez mûre pour diriger sa vie et prendre soin d’elle de manière indépendante, sans qu’il y ait atteinte à sa santé (pas de drogue, pas de prostitution par exemple), d’où un sentiment de grande confiance en elle, ce qui peut paraître paradoxal.

Une abonnée

Retour au sommaire 95

 

  Informations :
info@entretiens.ch
  Réalisation du site:
NetOpera/PhotOpera
 

© Entretiens sur
l'Education, 2000

Accueil Articles Archives Abonnements Adresses Le journal Archives