ARCHIVES (1996)

Dire «non» n’est pas toujours facile!

Cet après-midi, je lui ai dit «non» d’un ton calme, mais ferme. Elle n’a pas bronché et a dit «O.K.», je ne sors pas ce soir.

Un peu étonnée par cette docilité, mais soulagée, j’ai continué à vaquer à mes occupations. Plus tard, cette anecdote m’a inspiré quelques réflexions.
Vous le devinez sans doute, ce n’est pas toujours de cette manière que se déroulent les échanges entre ma fille et moi lorsqu’il s’agit de négocier les sorties et les heures de rentrée, par exemple. Qu’il est difficile parfois pour des parents de dire «non», alors qu’on nous répète partout combien il est important de savoir donner des limites à nos enfants.

Il est vrai que c’est un processus qui commence à la petite enfance. L’autre soir une pédiatre disait lors d’une table ronde sur la violence: «il n’est pas bon pour les enfants qu’ils aient tout, tout de suite, même le nourrisson à qui on donne le sein ou la sucette dès qu’il se met à pleurer, ne saura plus faire la distinction entre besoin réel et satisfaction immédiate. Il est en effet très important que les petits enfants, puis les adolescents aient des frustrations, entendez par là des sortes de barrières auxquelles ils puissent s’achopper et des limites à respecter, quitte à les transgresser.»

Pour ma part, je trouve que ce n’est pas facile de garder cette attitude ferme et tranquille. Je pense qu’il faut être des parents forts et sûrs de soi pour viser juste, sans s’énerver, ni avoir l’impression de faire la police. Ce «travail» de longue haleine nécessite beaucoup d’amour, d’écoute et de disponibilité, ce qui n’est pas toujours l’apanage de notre mode de vie en cette fin de siècle. Trop souvent bousculés par le temps qui manque, fatigués, absorbés par notre travail professionnel et aussi par notre confort matériel, nous nous laissons un peu aller! Nous aussi, nous voulons des résultats rapides: un four à micro-ondes qui réchauffe le repas en quelques secondes, un ordinateur qui est de plus en plus performant, un T.G.V. ou un avion qui nous emmène à des milliers de kilomètres d’ici en quelques heures, un fax ou le courrier électronique qui envoie et reçoit des messages instantanément; bref la notion du temps a changé, on ne sait plus attendre. Garder la tête froide dans ce tournis n’est pas chose aisée.

Cela demande un sacré équilibre mental et physique pour faire face sans s’énerver aux cris stridents du petit diable dans le chariot du supermarché, ou au gymnaste amateur qui a décidé de se rouler par terre au milieu de l’aéroport! Plus tard, avec les adolescents, être restrictif au niveau des sorties, vous classe d’emblée dans la catégorie des parents ringards, sans coeur, par rapport à ceux des copines qui eux ont tout compris! Ah la pression sociale!

Savoir s’y prendre, c’est tout un apprentissage qui se forge au fil du temps et à l’usage. Au fur et à mesure que les enfants grandissent, les discussions se développent, les échanges d’opinions se multiplient. Certes on n’est souvent pas d’accord les uns avec les autres, mais au moins on se parle. «Rien n’est pire que l’indifférence», disait encore cette pédiatre, «alors apprenons à communiquer par la parole et pas seulement par billets scotchés interposés». Il faut parfois avoir du courage pour affronter certaines situations avec nos enfants et reconnaître que les parents peuvent se tromper, mais surtout ne pas se sentir coupables de les «frustrer» de temps en temps au prix d’une bouderie ou d’un éclat de voix.

Françoise

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