ARCHIVES (1996)

Les années se suivent...

Pour moi, la fête des mères, c’est un jour où les habitudes devraient être renversées, c’est-à-dire que mon mari et mes enfants exécuteraient à ma place les tâches journalières (rangement, préparation des repas, vaisselle, etc.). Est-ce trop demander qu’un jour de congé par an? J’aimerai aussi qu’ils me disent qu’ils apprécient ce que je fais pour eux tous les autres jours de l’année. Mais cela reste un rêve car, eux, n’ont pas envie d’échanger les rôles, ni d’être reconnaissants. Les années se suivent et les frustrations s’accumulent...
Heureusement pour moi, il y a les bricolages faits en classe! Cette année-là, mon fils avait confectionné une papeterie. Sûre de mon bon droit et toute à mon désir de passer cette journée «en famille», j’ai refusé qu’il aille passer l’après-midi chez un copain. J’ai bien senti qu’il était fâché, mais ce n’est que l’année suivante que j’ai réalisé à quel point: n’ayant rien préparé en classe, il ne m’a rien offert! Devant mon étonnement, il m’a dit: «Je me suis donné tellement de mal pour réaliser ton cadeau, l’an passé, et tu ne m’as même pas laissé sortir! Alors cette année, je n’ai pas eu envie de te faire plaisir.» J’ai essayé d’expliquer ce que j’attendais d’eux et ce que symbolisait pour moi ce jour-là.
Préparée au pire, j’attendais avec curiosité la fête des mères suivante... Mon fils m’a offert le livre «Les mères» d’Alphonse Daudet, en me disant qu’il avait beaucoup cherché et qu’il avait fini par prendre conseil auprès d’une libraire tant il hésitait, vu le nombre de livres que j’avais déjà. Je l’ai lu avec émotion et reconnaissance!
... Les années se suivent, mais ne se ressemblent pas!

Christiane Walker

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© Entretiens sur
l'Education, 2000