ARCHIVES (1997)

Temps perdu, temps volé - temps pour toi, temps pour moi

Traversant le jardin anglais à vive allure, je suis contente d’avoir accompli dans le temps prévu - malgré la grande chaleur - mes différentes courses: passer à la banque pour mon compte et pour celui de mon employeur, à la pharmacie, à la poste et à la bibliothèque.
Tout en marchant, j’aperçois quelques enfants qui s’amusent sur les balançoires, qui courent à gauche et à droite, surveillés par leurs mamans. Leurs corps en exubérance et leurs cris me parlent de la joie de vivre qui les habite.
Qu’est-ce que ce petit pincement au coeur? Un brin de jalousie? La nostalgie fait surgir dans ma tête l’image de mon fils, qui court à mes côtés au même endroit. Il fait aussi chaud qu’aujourd’hui et les jardiniers de la ville ont installé les tuyaux d’arrosage.
- Maman, t’as le courage de te faire gicler?
Et moi qui pose mon panier en dehors de la zone dangereuse, qui cours avec Olivier dans tous les sens. Nous nous faisons asperger tous les deux et essayons de voir qui - de lui ou de moi - supporte le plus longtemps de rester sous les jets d’eau froide. Ah, ce qu’on a ri ce jour-là. Tant pis pour les cheveux décoiffés et les habits mouillés.
Ma foi, c’est du passé, cela ne reviendra plus et j’en ai le coeur lourd. Le présent est un peu triste et monotone. Aucun enfant ne m’empêche plus de planifier mon temps, d’organiser mes courses; plus de souliers à lacer en route, plus d’arrêts imposés par le petit pour des futilités (grimper sur un mur, sauter trois fois par-dessus une flaque,...), mais plus guère de rigolade non plus; tout est rapidité et précision.
Au bout du parc, je m’assieds à une table du bistrot, je sors un livre de mon cabas, je commande un thé glacé (si j’étais plus courageuse, ce serait du champagne!), je croise les jambes et je lis. JE LIS en plein milieu de l’après-midi. Plus aucun petit ne me dérange, parce que ses mains sont sales, parce qu’on l’a bousculé ou qu’on lui a chipé sa pelle ou que sais-je. Tant pis pour le temps «perdu» - je savoure cet instant volé à mon agenda.
C’est tout de même rudement bien d’avoir des enfants grands, ainsi que de superbes souvenirs de l’époque où ils étaient petits. Et voilà que j’ai retrouvé mon équilibre intérieur.

Eva Kaenzig
Communauté romande des Ecoles des parents
Groupe Média

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