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(1998)
Trésors
congelés
Avant
de partir en voyage pour un moment, ma femme et moi avons décidé
qu’il fallait faire un minimum d’ordre. J’ai quant
à moi entrepris le congélateur.
Vous ne vous imaginez pas tout ce qu’on peut découvrir
dans un tel appareil, dans le fond de tiroirs pas touchés
depuis assez longtemps. Du fumet de poisson, divers fonds de sauce
(indispensables accessoires du cuisinier!), du pesto aux noix de
macadamia (plus simple à préparer qu’avec les
pignons traditionnels), une ratatouille de Michel Olivier, un coulis
de petits fruits, du gingembre, des prunes pour un gâteau,
etc., etc.
Ce « ruclonnage » de congélateur met
ainsi à jour divers enthousiasmes culinaires. De ces trucs
qu’on garde, parce que c’était délicieux,
parce qu’on pense refaire ce plat. Préserver le plaisir
d’un soir. Congeler ses souvenirs pour les faire resurgir à
l’occasion.
Eh oui! Ici et là vient la désillusion. Car deux ans
déjà, c’est bien vieux pour du congelé.
D’accord, c’était bien bon en son temps, mais maintenant...
Mieux vaut jeter, c’est plus sûr.
Avec ce genre de réflexion, notre congélateur a retrouvé
une nouvelle jeunesse. Il ne contient plus rien d’ancien. Après
avoir fait place nette, il peut à nouveau accueillir des
enthousiasmes. Et je vous garantis qu’il en aura!
Il en va ainsi dans bien des situations. De temps en temps, il n’est
pas inutile de passer en revue les projets mis au congélateur,
les problèmes écartés pour un moment mais non
résolus pour autant, quelques idées géniales
mais combien fugaces, etc., etc.
Des choses à jeter, les inutiles ou les vieillies. D’autres
au contraire à reprendre avant de les oublier, afin de les
faire revivre et refleurir. Les enthousiasmes en particulier. Il
est toujours si dommage de les laisser dormir, de les geler, de
négliger leur apport vivifiant. Car à notre époque,
nous avons plus que jamais besoin de ces élans qui nous portent
à voir plus loin. Non pas béatement, mais avec confiance
et lucidité, avec réalisme aussi, pour être
capable de mieux empoigner les années à venir. C’est
ce que je nous souhaite à tous.
Dr François Bertrand
Article paru dans le « Journal Suisse de Pharmacie »
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